Quelles pratiques favorisent le respect de la dignité et de l’intégrité en ESSMS ?

Qu’est-ce que le respect de la dignité et de l’intégrité ? Comment l’application de ces droits est-elle évaluée par la HAS ? Quelles sont les bonnes pratiques à mettre en place dans un établissement ?

Respect de la dignité et de l’intégrité

Les droits des patients et des usagers sont encadrés par de nombreux textes réglementaires, dont la loi du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale qui reconnaît à la personne accompagnée sept droits distincts. Parmi eux, nous retrouvons le droit au respect de la dignité, de l’intégrité, de sa vie privée, de son intimité et de sa sécurité.

Après avoir abordé les notions de respect de la vie privée et de l’intimité dans notre article précédent, nous évoquerons ici le droit au respect de la dignité et de l’intégrité des personnes accompagnées au sein d’ESSMS.

Rappelons que le respect des différents droits des usagers est contrôlé lors de l’évaluation externe portée par la HAS, avec la publication, le 10 mars 2022 d’un référentiel national de la qualité commun à tous les ESSMS. L’objectif de cette évaluation et de ce référentiel étant de promouvoir les droits et libertés des personnes accompagnées, tout en accompagnant les établissements dans leur démarche d’amélioration continue des soins et des prestations qu’ils délivrent.

Mais alors, qu’est-ce que le respect de la dignité et de l’intégrité ? Comment l’application de ces droits est-elle évaluée par la HAS ? Quelles sont les bonnes pratiques à mettre en place dans un établissement ?

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Le respect de la dignité et de l’intégrité en ESSMS : définition

La dignité est un droit fondamental intégré à la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui dispose que « la dignité humaine est inviolable. Elle doit être respectée et protégée ».

En effet, le respect de la dignité est un des principes éthiques le plus fondamental, la charte universelle des droits de l’homme reconnaît par ailleurs ce principe en l’attribuant à chacun du seul fait de son humanité. À partir de cet état, elle affirme qu’une personne ne perd jamais sa dignité, indépendamment de son sexe, de son état de santé, de sa religion, de sa condition sociale, de son âge, ou de son origine ethnique.

Les droits qui encadrent le respect de la dignité

Dans le secteur de la santé, le respect de la dignité est considéré comme le respect de la personne et de ses droits ainsi que le respect de la volonté de la personne. Ainsi, ce principe implique plusieurs droits et notions tels que :

respect de la dignité Le droit d’être traité avec égards : concerne le respect de l’intimité de la personne, de ses croyances religieuses et convictions, ainsi que sa qualité de prise en charge (conditions d’hospitalisation respectueuses).

respect de la dignité Le droit à une fin de vie digne : c’est-à-dire éviter l’acharnement thérapeutique, et le fait de l’accompagner dans les meilleures conditions possibles jusqu’à la fin. À titre d’exemple, le développement des soins palliatifs permet de proposer à la personne accompagnée la meilleure préservation possible de leur qualité de vie, et de proposer aux proches un soutien.

respect de la dignité Le respect de la dignité jusqu’à la mort : il est interdit de procéder à certains actes médicaux sur une personne décédée sans consentement explicite lors de son vivant.

respect de la dignité La bientraitance : pierre angulaire du référentiel de la HAS, la bientraitance concerne la promotion du bien-être de l’usager, la participation de la personne accompagnée et de son entourage, la prise en charge institutionnelle, la qualité de l’accueil, la qualité de la relation entre le soignant et la personne accompagnée ainsi que le respect de ses droits. La notion de bientraitance n’est pas à négliger puisque celle-ci puise ses fondements dans les textes relatifs aux droits de l’homme, repris dans la loi du 2 janvier 2002 pour le secteur médico-social et la loi du 4 mars 2002 pour le secteur sanitaire.
La bientraitance est donc un élément constitutif du respect de la dignité. Celle-ci fait notamment référence à la prévention de la maltraitance qui concerne toutes les formes d’atteinte à l’intégrité morale ou physique de la personne accompagnée (violences morales et physique, non-respect du consentement, négligence, etc.)

Le respect de l’intégrité

Le respect de la dignité suggère également de respecter l’intégrité de la personne accompagnée. 

Le respect de l’intégrité regroupe deux dimensions :

respect de la dignité Le respect de l’intégrité physique : assure la protection du corps et de la vie humaine. Ce principe a été induit par les lois « Bioéthique » de 1994, réformées en 2004 et introduites dans le Code Civil par l’intermédiaire de l’article 16 qui dispose que « la loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie ».
Par ailleurs, l’article 16-1 alinéa 2 du Code Civil dispose également que « le corps humain est inviolable ». Cette loi a pour objectif de protéger le corps humain de quiconque contre les atteintes de tiers. Néanmoins, plusieurs atteintes au corps humain sont considérées comme licites telles que les vaccins obligatoires.
Cet article comprend également deux conditions à l’atteinte du corps humain : la nécessité thérapeutique pour une personne et son consentement préalable.

respect de la dignité Le respect de l’intégrité morale : cette notion est assurée par divers droits reconnus à la personne accompagnée tels que le droit à l’image, le droit à la vie privée et le droit à la vie.

Quelques exemples d’atteinte au respect de la dignité

Pour illustrer nos propos, voici quelques situations où la dignité et l’intégrité de la personne accompagnée ne sont pas respectées. Vous trouverez plus de détails et d’exemples dans le rapport de V. Gahdi et de C. Compagnon sur la « maltraitance ordinaire ».

Le respect de la dignité et de l’intégrité et l’évaluation externe de la HAS

À travers l’évaluation externe des ESSMS, la HAS veille au bon respect des droits des usagers. Plusieurs critères du référentiel de la qualité des ESSMS concernent ces droits, dont des critères impératifs.

À proprement parler, il n’y a qu’un seul critère impératif concernant explicitement la dignité et l’intégrité de la personne accompagnée :

Le Critère (impératif) 2.2.2 – « Les professionnels respectent la dignité et l’intégrité de la personne accompagnée. »

 

Celui-ci est composé de 3 éléments d’évaluation :

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Néanmoins, l’évaluation externe de la HAS ne se résume pas qu’aux critères impératifs. Il faut prendre le référentiel dans son ensemble pour pouvoir répondre de manière réellement satisfaisante aux exigences de celui-ci. La prévention de la maltraitance étant l’un des points constitutif de la dignité, il nous semblait pertinent de vous présenter les critères se rapportant à la bientraitance :

Ce qu’il faut retenir, c’est que le respect de la dignité et de l’intégrité de la personne accompagnée s’inscrit dans la stratégie globale de l’établissement. Ces notions ne concernent pas que des moments précis, mais bien la vie au quotidien des personnes au sein de l’établissement, ce qui nécessite un questionnement éthique et la remise en question des pratiques. 

C’est également un travail d’équipe, les questionnements et pratiques doivent être partagés entre les professionnels, pour que tous agissent dans la même dynamique. Par ailleurs, il peut exister des situations involontaires ou la dignité et l’intégrité des personnes ne sont pas assurées, dans le cas d’un manque de ressources humaines ou financières par exemple.

Respect de la dignité et de l’intégrité : les bonnes pratiques à mettre en œuvre

respect de la dignité

Ce paragraphe a pour objectif de vous présenter quelques pratiques à mettre en place dans un établissement afin de répondre convenablement aux exigences de la HAS.

1. Impliquer les acteurs de l’établissement

En premier lieu, promouvoir la bientraitance (et par conséquent le respect des droits de l’usager) suggère une mobilisation de l’ensemble des acteurs de l’établissement. On parle ici du personnel (administratifs, soignants, etc.), comme de la direction et de la gouvernance. Cette mobilisation doit donner lieu à la politique de l’établissement en faisant figurer la bientraitance dans les valeurs de celui-ci et ainsi se décliner en plan d’actions dans le projet d’établissement. À savoir que les personnes accompagnées doivent également être impliquées dans ce processus. En effet, la capacité d’expression de ces derniers est une réelle indication de la mise en œuvre de la bientraitance dans l’établissement. Néanmoins, impliquer l’ensemble des acteurs sur ce sujet-là nécessite qu’eux même savent de quoi ils parlent. Les acteurs sont ils sensibilisés aux problématiques de la bientraitance ? de la dignité et de l’intégrité ? de la vie privée et de l’intimité ? etc. Des formations de sensibilisation peuvent être organisées afin d’induire une nouvelle culture au sein de l’établissement.

La promotion de la bientraitance est également un sujet pouvant être abordé par le CVS (Conseil de la Vie Sociale). Cette instance a un rôle d’écoute et de prise en compte de la parole des personnes accompagnées, dans l’objectif d’améliorer les pratiques en inscrivant leurs réflexions dans la stratégie globale de l’établissement.

2. Poser un diagnostic et mettre le doigt sur les défaillances

En effet, pour sensibiliser les professionnels et se rendre compte des situations de maltraitance et de non-respect des droits des usagers, il est important de recueillir régulièrement le récit du quotidien des personnes accompagnées. Ces témoignages peuvent être recueillis lors de focus group animés par des professionnels neutres, ou un membre du CVS (ou bien même un usager). L’idée étant de faciliter l’expression des personnes accompagnées quant à la perception de leur traitement au sein de l’établissement.

Pour déterminer les situations d’atteinte à la dignité, les plaintes et réclamations doivent être examinées de manière systémique. L’intérêt est de poser un regard sur les pratiques de l’établissement, d’en discuter entre les équipes et de déceler les situations possibles de maltraitance.

La réalisation d’enquêtes sur certains sujets peuvent également aider les professionnels à déceler les situations où la dignité n’est pas garantie / respectée. Ces enquêtes peuvent être quantitatives et doivent interroger aussi bien les personnes accompagnées que leur entourage / proches. Les observations terrain sont également un moyen pertinent de se rendre compte de la réalité. L’idée n’est pas de contrôler le travail des professionnels, mais de créer une opportunité de réflexion sur leurs propres pratiques, et le fonctionnement de l’établissement.

Enfin, il peut également être pertinent de s’intéresser à certains indicateurs (traçabilité de la douleur, ou encore suivi de consommation des protections pour les personnes âgées). L’idée est de susciter un débat et d’engager les échanges entre professionnels autour d’une problématique a priori identifiée.

Poser un diagnostic permet aux professionnels de se sensibiliser face aux constats réalisés, et leur permet ainsi de rentrer dans une véritable réflexion éthique, tout en renforçant et en donnant des axes d’amélioration concernant la stratégie de l’établissement en matière de bientraitance.

3. Mettre en œuvre la bientraitance

Après avoir posé un diagnostic, il faut améliorer les pratiques qui en ont besoin. Pour cela, il faut réussir à porter le débat et les échanges au sein de chaque service de l’établissement. C’est en s’interrogeant et en menant des réflexions que les mauvaises pratiques disparaîtront. Les débats doivent alors prendre en compte les difficultés de l’établissement et proposer des actions d’amélioration (faut-il plus de moyens humains ou financiers ? Les professionnels sont-ils assez sensibilisés, sont-ils assez informés ?)

Une Charte de la bientraitance peut être instaurée au sein de l’établissement. Il s’agit ici de mener des réflexions et de partager des valeurs professionnelles fortes autour de la bientraitance. L’objectif de celle-ci est de mettre à disposition des établissements un outil partagé leur permettant de développer les bonnes pratiques de bientraitance. Celle-ci doit être accompagnée d’un guide d’utilisation. Cette charte doit être diffusée auprès des professionnels, des personnes accompagnées et de leurs proches afin que ceux-ci puissent y contribuer.

Ce genre d’outil permet notamment aux professionnels de partager entre eux les bonnes pratiques et de mettre en œuvre la bientraitance dans des situations particulières. Elle permet également aux personnes accompagnées de se questionner, et peut être, de libérer leur parole.

Enfin, pour s’assurer que les pratiques ont évolués, il faut les évaluer. Cette évaluation peut notamment s’appuyer sur les témoignages des personnes et le recueil de leur satisfaction, un échange avec les professionnels sur ces actions et leur point de vue sur celles-ci, et une analyse comparée dans le temps des comptes-rendus du CVS.

Conclusion et ressources complémentaires

Pour résumer, les notions de respect de la dignité et de l’intégrité sont des dimensions de la bientraitance. Il s’agit de droits fondamentaux qu’il est nécessaire de respecter pour accompagner les usagers dans leurs parcours. Si le référentiel national de la qualité des ESSMS ne présente qu’un seul critère impératif concernant les principes de dignité et d’intégrité, il est important de prendre en compte l’ensemble des critères relatifs à la bientraitance pour mettre en place les actions les plus pertinentes.

Après avoir posé un diagnostic et amélioré les pratiques, plusieurs outils d’auto-évaluation de la bientraitance peuvent être utilisés. Nous pouvons par exemple citer « Amélioration des pratiques de bientraitance : outil d’évaluation » - ReQuA , « Regard croisés sur la bientraitance : outil d’évaluation » - Réseau QualiSanté , le « Tableau de bord de la bientraitance : cartographie des risques » - RSQ…. Vous retrouverez l’ensemble de ces outils dans « Le déploiement de la bientraitance – Guide à disposition des professionnels en établissements de santé et EHPAD ».

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