Comment favoriser l’autodétermination en ESSMS ?

Quelle est la définition proposée par la HAS ? Quels sont ses enjeux ? Quelles pratiques et initiatives mettre en œuvre pour promouvoir l’autodétermination ?

Autodétermination ESSMS

La transformation de l’offre du secteur social et médico-social vise à promouvoir un accompagnement (et plus particulièrement des personnes handicapées) plus inclusif, plus souple et plus adapté à la prise en compte des situations individuelles.

L’objectif n’est pas seulement d’offrir aux personnes accompagnées la possibilité de choisir l’établissement qu’elles souhaitent intégrer, mais de favoriser leur participation dans l’accompagnement dont elles bénéficieront.

Cette orientation est, par ailleurs, soutenue par l’évaluation externe de la HAS qui présente plusieurs enjeux tels que :

autodétermination essms Permettre à la personne d’être actrice de son parcours.

autodétermination essms Renforcer la dynamique qualité au sein des établissements et services.

autodétermination essms Promouvoir une démarche porteuse de sens pour les ESSMS et leurs professionnels.

Pour que la personne soit actrice de son parcours, celle-ci doit être en capacité de faire des choix éclairés et de les exprimer. Cela renvoie directement au pouvoir d’agir de la personne et au principe de participation active. On parle alors d’« autodétermination ».

L’autodétermination est un véritable levier de l’inclusion sociale, puisque ce concept reconnaît que chaque individu a le droit d’être acteur de sa vie, en lui donnant une place citoyenne pleine et entière.

Ce concept, relativement récent dans le secteur social et médico-social, est lié au respect des droits, à la qualité des relations interpersonnelles, au bien-être émotionnel et à la satisfaction face à sa propre vie.

Pour améliorer la qualité de vie des personnes accompagnées, de nombreux établissements se mobilisent pour repenser la mise en œuvre de l’autodétermination.

Mais plus concrètement, quelle est la définition proposée par la HAS ? Quels sont ses enjeux ? Quelles pratiques et initiatives mettre en œuvre pour promouvoir l’autodétermination ?

Table des matières 

Qu’est-ce que l’autodétermination ?

Définition de l’autodétermination

Selon la HAS, l’autodétermination est « l’ensemble des habiletés et des attitudes, chez une personne, lui permettant d’agir directement sur sa vie en effectuant librement des choix non influencés par des agents externes » (Wehmeyer, professeur d’éducation spécialisé ayant mené des travaux de recherche sur l’autodétermination, 1996).

De plus, il nous semblait important de rappeler que l’autodétermination est un droit qui s’applique à chaque personne, du simple fait de son existence. Promouvoir l’autodétermination, c’est reconnaître et respecter l’usager en tant que personne à part entière.

Plus concrètement, l’autodétermination est la capacité de la personne accompagnée à prendre des décisions et à faire des choix par elle-même. La personne est actrice de ses choix et de sa vie sans être contrainte par l’influence d’une personne.

Qu’est-ce qu’un comportement autodéterminé ?

Pour qualifier un comportement autodéterminé, celui-ci doit permettre à son auteur « d’agir comme le principal agent causal de sa vie afin de maintenir et d’améliorer sa qualité de vie ». (Wehmeyer)

Un comportement autodéterminé présente plusieurs caractéristiques essentielles :

En bref, pour induire un comportement autodéterminé chez la personne accompagnée, il faut que celle-ci connaisse ses doits et ses devoirs, ses forces et faiblesses, ses désirs et envies ainsi que les opportunités ou les risques de l’environnement qui l’entoure.

L’autodétermination suggère une connaissance profonde de soi-même et de ses capacités. La personne est en mesure de prendre des décisions, de faire des choix et de se fixer des objectifs.

Ce concept est un enjeu central du développement de l’autonomie des personnes accompagnées. C’est une compétence qui concerne chaque personne et qui s’acquiert progressivement tout au long de la vie, peu importe les maladies ou pathologies rencontrées.

Freins et facilitateurs à l’autodétermination

Au regard des précédents paragraphes, l’autodétermination est le résultat de l’interaction entre une personne (facteurs personnels) et son environnement (facteurs environnementaux).

Pour favoriser l’autodétermination, il est donc important d’intervenir sur deux niveaux : celui de la personne (facteurs personnels) et celui de l’environnement (facteurs environnementaux) afin d’offrir à la personne accompagnée des opportunités de faire des choix et d’éliminer les obstacles rencontrés.

L’autodétermination et les facteurs personnels

Les facteurs personnels se réfèrent aux caractéristiques individuelles qui influent sur la capacité d’une personne à prendre des décisions autonomes et à exercer un contrôle sur sa vie. Ces facteurs varient d’une personne à l’autre et peuvent être influencés par des aspects psychologiques, émotionnels, cognitifs et physiques. Voici quelques exemples de facteurs personnels :

L’autodétermination et les facteurs environnementaux

Les facteurs environnementaux se réfèrent aux éléments externes qui peuvent influencer la capacité d’une personne à prendre des décisions autonomes et à exercer un contrôle sur sa vie.

Ces facteurs peuvent créer un contexte favorable ou défavorable à l’autodétermination d’une personne. En voici quelques-uns :

Pourquoi favoriser l'autodétermination en ESSMS ?

Au-delà de la volonté du gouvernement de promouvoir une société plus inclusive, développer l’autodétermination des personnes accompagnée présente plusieurs avantages

L’autodétermination, un facteur de participation sociale et de qualité de vie : zoom sur l’évaluation externe de la HAS

D’un point de vue pratique, l’autodétermination permet aux établissements de proposer un accompagnement parfaitement adapté aux besoins de la personne. En effet, une personne avec un comportement autodéterminé exprime ses besoins, ses envies, et prend des décisions. Elle participe de manière active à l’élaboration de son projet personnalisé.

Favoriser l’autodétermination dans son établissement, c’est aussi s’inscrire dans la volonté de la HAS (via l’évaluation externe) d’améliorer la qualité de vie des personnes accompagnées.

En effet, dans son référentiel d’évaluation, la HAS présente plusieurs grandes thématiques permettant d’améliorer l’accompagnement des usagers. Nous avons principalement relevé les thématiques suivantes :

En effet, la qualité de vie est en partie liée aux possibilités pour les personnes accompagnées de prendre part aux décisions qui les concernent, tant sur le plan individuel que collectif.

Ainsi, sur le plan collectif, il faut permettre aux usagers de pouvoir exercer leur rôle de citoyens, et donc de participer à la vie collective de leur établissement. Ils ne sont pas de simples bénéficiaires passifs, mais bien des citoyens à part entière.

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Évaluation externe de la HAS : comment se préparer à la visite des locaux ?
Mardi 14 mai 2024 de 14h à 15h
Par Alice Müller, formatrice et consultante GePI Conseil X l'association Adèle de Glaubitz

Quelles pratiques pour favoriser l’autodétermination ?

L’objectif de ce paragraphe est de vous donner de grandes orientations pour favoriser l’expression et la participation des personnes concernant leur propre accompagnement et le fonctionnement de leur établissement.

Personnaliser l’accompagnement de la personne

1. Soutenir l’expression et la compréhension des personnes

L’autodétermination suggère que la personne accompagnée peut s’exprimer et communiquer. Cela n’est pas forcément le cas de tous, et plus particulièrement dans les établissements accueillant des personnes présentant des troubles / déficiences intellectuelles. Néanmoins, cela ne veut pas dire qu’ils ne peuvent pas communiquer ! Il suffit simplement de leur donner les moyens et de personnaliser son approche.

Pour trouver les moyens et outils les plus adaptés, il faut évaluer les stratégies de communication de la personne, tenir compte de ses capacités cognitives, sensorielles, etc. Cette évaluation doit être réalisée au moment de l’accueil dans l’établissement. On évalue également son envie de communiquer avec les autres. Cette évaluation doit être menée en groupe pluridisciplinaire et avec les proches / la famille de la personne.

autodétermination essms Quelques outils pour favoriser la communication et la compréhension

La parole n’est pas le seul moyen d’entrer en relation avec quelqu’un, les professionnels peuvent recourir à différentes méthodes permettant de faciliter la compréhension : l’utilisation de supports visuels (photos, pictogrammes, vidéos), l’écriture, les gestes, les odeurs, le Makaton, le FALC, etc.

Pour soutenir l’expression de la personne accompagnée, les professionnels doivent se mettre dans une position d’écoute active. Ils cherchent à valoriser tout effort de communication de la part de la personne accompagnée, en la laissant s’exprimer jusqu’au bout (malgré la lenteur ou la difficulté), ils lui proposent d’autres supports de communication, en lui montrant qu’elle est écoutée.

Les professionnels portent également une attention particulière à la manière dont ils regardent les personnes accompagnées (le regard peut être intrusif), à la proximité physique, etc.

C’est en améliorant les capacités de communication et de compréhension des personnes accompagnée (et des professionnels) que celles-ci seront plus encline à exprimer leurs préférences, leurs besoins et objectifs.

2. Impliquer la personne accompagnée dans la construction de son projet personnalisé

Impliquer activement les personnes dans la co-construction de leur projet personnalisé est un véritable levier pour favoriser l’autodétermination au sein des ESSMS. Cela implique de reconnaître et de respecter le rôle central de la personne accompagnée, en favorisant son expression dans la définition de ses objectifs, de ses besoins et de ses préférences.

Par ailleurs, rappelons que l’autodétermination est un droit. Il faut expliquer et repréciser à la personne accompagnée l’ensemble de ses droits.

Dans nos précédents articles, nous avons abordé les différents droits des usagers, tels que la liberté d’aller et venir, la dignité et l’intégrité, ou encore le respect de la vie privée. N’hésitez pas à les consulter pour en savoir plus.

En donnant à la personne accompagnée un rôle actif dans la définition de son projet personnalisé, on renforce son sentiment de responsabilité et d’autonomie. Elle se sent davantage investie dans le processus et est plus susceptible de s’engager activement dans la réalisation de ses objectifs. Cela contribue à renforcer sa confiance en elle et sa capacité à exercer un contrôle sur sa vie.

La co-construction du projet personnalisé doit être un processus dynamique et évolutif, capable de s’adapter aux changements de circonstances et aux nouvelles situations. Il est essentiel de maintenir une approche flexible et réceptive, en réévaluant régulièrement les objectifs et les stratégies en fonction des besoins et des préférences de la personne accompagnée.

En effet, développer l’autodétermination d’une personne lui permettra, lors de la réévaluation de son projet d’accompagnement, de mieux exprimer ses besoins, ses attentes, etc. et profitera ainsi d’un accompagnement réellement personnalisé et inclusif.

autodétermination essms Comment aider la personne à prendre des décisions qui la concerne ?

Pour rappel, l’autodétermination n’est pas innée, elle se travaille et se développe tout au long de la vie. La mise en place d’ateliers de connaissance de soi, par l’intermédiaire de jeux est un exercice ludique et simple permettant aux personnes accompagnées de mieux définir ce qu’elles aiment ou non, ce qu’elles souhaitent, etc.

1. Créer un environnement favorisant la création de liens sociaux

Les professionnels ne doivent pas hésiter à proposer à la personne accompagnée des moments de convivialités, pour créer du partage, des liens et des amitiés. D’autres activités peuvent être proposées telles que des cours de théâtre, de cuisine, de gym, une rencontre avec des animaux, des séjours extérieurs, etc. L’idée est de redonner à la personne accompagnée sa réelle place de citoyen, en lui donnant l’opportunité de créer des relations avec les autres, et en la plaçant dans un environnement opportun.

Note : un citoyen ne se définit pas uniquement d’un point de vue juridique, il se définit également comme une personne participant à la vie de la cité. Il s’agit d’une personne en capacité de communiquer avec les autres, de créer des liens, etc.

Pour favoriser le développement des liens sociaux, les professionnels peuvent également recommander l’intervention de pairs-aidants. Pour rappel, un pair-aidant a pour rôle d’accompagner la personne dans ses démarches, sans faire à sa place.

La reprise du pouvoir d’agir est une dimension fondamentale dans l’intervention des pairs. Dans la plupart des cas, la relation d’entraide pousse les personnes accompagnées à « reprendre le contrôle » en s’investissant plus dans leur traitement, ou en recherchant des solutions à leurs problèmes, ce qui les éloigne de leur traditionnel rôle de « malade ».

Si vous souhaitez en savoir plus sur la pair-aidance, n’hésitez pas à consulter notre article dédié « Qu’est-ce que la pair aidance ? Quels sont ses bénéfices ? »

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2. Permettre aux personnes accompagnées d’exercer pleinement leur rôle de citoyen

Enfin, il faut donner les moyens, aux personnes qui le peuvent encore, de voter ou de s’investir dans les instances décisionnaires de l’établissement. À titre d’exemple, le Conseil de Vie Sociale est une instance à laquelle les pouvoirs publics attachent une grande importance. Il est obligatoire dans les établissements sociaux et médico-sociaux. Son rôle a été renforcé par le Décret n° 2022-688 du 25 avril 2022. La HAS lui accorde une place importante puisqu’il participe à l’évaluation et concerne 10 critères avec 40 questions du référentiel.

Les personnes accompagnées doivent être informées (ainsi que leur famille) de la possibilité de participer au Conseil de la Vie Sociale (CVS). Pour rappel, le rôle du CVS et ses missions doivent systématiquement être présentés aux bénéficiaires de la structure. CVS est considéré comme un outil de l’autodétermination (les personnes vont s’exprimer, poser un certain nombre de questions sur leur condition de vie). De plus, le CVS comprend majoritairement des personnes accompagnées et est présidé par l’une d’entre elle. C’est un lieu d’expression collective et de valorisation de la parole des personnes accompagnées

Il existe une multitude de projets dans lesquels les personnes accompagnées peuvent s’investir, comme la participation à l’élaboration du règlement de fonctionnement de l’établissement, la commission des repas, ou encore la participation à des instances associatives et décisionnaires.

Note : encore une fois, il s’agit d’accompagner le résident dans la réalisation de ses projets. Ainsi, il faut lui donner les moyens de remplir pleinement son rôle (préparation des séances, aide à la prise de parole, etc.) pour que la personne puisse avoir une place à part entière dans ces instances.

Pour favoriser la participation des personnes accompagnées au sein de ces instances, l’établissement peut recourir à des partenariats avec les conseils municipaux, les centres de loisirs, des associations culturelles ou sportives, etc.

Note : ce n’est pas parce qu’une personne choisit de ne pas participer aux instances précédemment citées qu’elle n’est pas autodéterminée. En effet, la non-participation est un droit. La personne choisit de ne pas participer, ce qui est également une composante importante du pouvoir d’agir. 

1. Inscrire l’autodétermination dans le projet d’établissement

Le projet d’établissement définit les objectifs, les valeurs, les politiques et les plans d’actions d’un établissement. Il permet de définir les grandes orientations stratégiques à mener pour les années à venir, en coordonnant l’ensemble des acteurs de la structure.

Il fédère les équipes autour d’objectifs et de pratiques communes. Pour développer une politique inclusive en renforçant le pouvoir d’agir des personnes accompagnées, le principe d’autodétermination et les moyens qui en découlent doivent être inscrit dans le projet d’établissement.

Il fédère les équipes autour d’objectifs et de pratiques communes. Pour développer une politique inclusive en renforçant le pouvoir d’agir des personnes accompagnées, le principe d’autodétermination et les moyens qui en découlent doivent être inscrit dans le projet d’établissement.

2. Former les professionnels au principe d’autodétermination

Pour favoriser l’autodétermination des personnes, il est essentiel que les accompagnants (les professionnels) soient sensibilisés et formés à cette thématique.

Une fois les équipes sensibilisées, il faut les impliquer dans l’élaboration des politiques inclusives établies dans le projet d’établissement. On sécurise les professionnels en menant une réflexion et un travail en équipe pluridisciplinaire, impliquant l’ensemble de la chaîne hiérarchique, sur l’accompagnement des personnes.

Enfin, les professionnels doivent porter une attention particulière au rapport bénéfices/ risques concernant l’accompagnement à l’autodétermination proposé aux personnes. En effet, les professionnels doivent pouvoir se détacher quelques instants de leur rôle afin de laisser les personnes oser faire des choses, prendre des risques, se tromper, etc. L’idée est de trouver un bon équilibre entre la prise d’initiatives de la personne et sa sécurité.

Promouvoir l’autodétermination au sein des établissements sociaux et médico-sociaux représente bien plus qu’une simple adaptation des pratiques d’accompagnement. C’est une démarche profonde qui reconnaît et respecte la dignité et les droits fondamentaux de chaque individu, quel que soit son parcours ou ses besoins spécifiques. L’autodétermination va au-delà du simple fait de permettre à une personne de faire des choix ; elle lui donne les moyens de prendre le contrôle de sa vie, de s’engager activement dans son processus d’accompagnement et de participer pleinement à la vie en société.

En conclusion, promouvoir l’autodétermination en ESSMS est un engagement essentiel pour une société plus inclusive et respectueuse de la diversité humaine. C’est un défi stimulant mais nécessaire, qui nécessite l’implication de tous les acteurs concernés, des professionnels aux personnes accompagnées, en passant par les familles et les instances décisionnaires. En travaillant ensemble, nous pouvons créer des environnements où chacun a la possibilité de s’épanouir, de réaliser ses aspirations et de contribuer pleinement à la communauté.

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