Dans un précédent article, nous avons posé les bases de la Qualité de Vie et des Conditions de Travail en ESSMS : définitions, enjeux pour la santé au travail et impératifs d’une démarche structurée.
Nous allons maintenant détailler comment concevoir et déployer une démarche QVCT dans un ESSMS, en nous appuyant sur quatre principes essentiels :
- C’est une démarche globale : elle croise les enjeux liés aux personnes, à la qualité et l’organisation du travail, et à la performance du service rendu. Les bénéfices concernent à la fois les usagers, les professionnels et l’établissement.
- C’est une démarche collective : elle associe tous les acteurs de l’établissement.
- C’est une démarche expérimentale : teste des solutions à petite échelle avant déploiement, permettant d’apprendre collectivement et de sécuriser les actions.
- Une démarche centrée sur le travail réel : améliore les conditions de travail au plus près du quotidien des salariés et des usagers.
Ces principes donnent à la QVCT sa valeur stratégique : c’est un outil de transformation concret, ancré dans l’activité quotidienne et orienté vers des résultats tangibles. L’implication de la direction est alors indispensable.
Pour cet article, nous nous appuyons sur le guide de la qualité de vie au travail – outils et méthodes pour conduire une démarche QVT, réalisé conjointement par le ministère de l’action et des comptes publics, et l’Anact.
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💻QVCT en ESSMS : améliorer la qualité de vie au travail pour mieux accompagner les personnes
Aziz EL QOMRI, Consultant, formateur GePI Conseil et chef de projet QVCT
Mettre en œuvre une démarche QVCT en ESSMS : la phase de préparation
Souvent négligée, cette étape est pourtant déterminante : elle installe un socle de confiance, clarifie les enjeux et mobilise les acteurs.
Elle repose sur plusieurs leviers :
- Sensibiliser les parties prenantes pour partager un vocabulaire commun et clarifier les enjeux.
- Ouvrir la discussion dans les instances de dialogue social
- Sonder les équipes sur leur perception de la QVCT et leurs attentes afin d’identifier à la fois les freins éventuels et les leviers de mobilisation.
- Repérer les compétences disponibles en interne pour la conduite de projet, et envisager des formations ou des appuis externes.
- Préparer les managers et les acteurs relais, leur rôle sera central pour accompagner les expérimentations et faciliter l’appropriation sur le terrain.
Cette phase permet de repérer les obstacles potentiels (manque de temps, crainte d’une démarche “gadget”, déficit de dialogue social, manque de compétences) et d’y apporter des réponses adaptées.
Étape 1 : Conception et pilotage de la démarche QVCT en ESSMS (cadrage et lancement du projet)
1. Installer un système d’acteurs pour piloter la démarche QVCT
La constitution d’un Comité QVCT
L’objectif : définir les modalités de pilotage, les acteurs impliqués et les règles de fonctionnement.
La réussite de cette phase repose sur la création d’un comité QVCT. Instance de pilotage collective, il assure une représentativité équilibrée de l’ensemble des catégories professionnelles.
Son rôle est double :
- Structurer et organiser la démarche tout au long du projet, en facilitant la coordination et la prise de décision.
- Déployer et ancrer la démarche en interne, en permettant à chacun de se l’approprier et en veillant à sa pérennisation.
De plus, l’implication active des instances représentatives (CSE, syndicats) est essentielle pour piloter la démarche QVCT. On distingue deux niveaux complémentaires :
- Le dialogue social qui contribue à sécuriser et légitimer la démarche.
- Le dialogue professionnel, permet aux équipes d’exprimer leurs expériences, difficultés et propositions d’amélioration.
2. Identifier les enjeux QVCT pour la structure
Identifier les enjeux QVCT ne revient pas à dresser une liste de dysfonctionnements. Il s’agit de mettre en lumière ce qui donne du sens au travail : reconnaissance du travail, autonomie, coopération, initiative, relation aux usagers, innovation ou encore maîtrise des processus… sans oublier les enjeux sociétaux propres à l’ESSMS.
Ces discussions collectives permettent de fixer des priorités et, si possible, de définir un accord de méthode qui servira de cadre souple pour le diagnostic, les expérimentations et le plan d’actions.
Étape 2 : Le diagnostic et les choix d’expérimentations
Cette étape vise à établir un diagnostic partagé de la situation et à choisir les premières expérimentations qui permettront d’ancrer la démarche QVCT dans la réalité du travail.
Co-construire et partager le diagnostic
Le diagnostic doit être co-construit avec l’ensemble des acteurs de l’établissement. Deux questions clés guident cette étape :
- Comment le diagnostic va-t-il être réalisé, et avec quels outils ?
- Est-ce que le diagnostic posé fait sens pour toutes les parties engagées ?
Ce travail permet de prioriser les sujets : conditions de travail, prévention des risques psychosociaux, attentes des équipes ou impacts des actions de prévention. L’objectif est de sélectionner des thématiques pertinentes et mobilisatrices pour chaque service. Le choix du diagnostic doit faire l’objet d’un débat et d’un accord entre les parties prenantes.
L’analyse de la charge de travail et des pratiques managériales
Il est intéressant de mettre en place un tableau de bord qui enveloppe les thèmes principaux – le bien être, l’épanouissement, la charge de travail, etc. Une analyse détaillée prend en compte l’ensemble de ces éléments.
Note : Le diagnostic s’appuie sur une analyse de données déjà disponibles.
Voici quelques exemples de données concernant la charge de travail :
- Indicateurs de santé (accidents, maladies professionnelles, inaptitudes).
- Indicateurs de perception (enquêtes auprès des professionnels).
- Indicateurs de fonctionnement (absentéisme, bilans sociaux, rapports hygiène et sécurité).
- Indicateurs relatifs aux événements indésirables liés aux risques psychosociaux
- Indicateurs relatifs aux plaintes et réclamations
- Inventaire des pratiques et dispositifs RH en place
- Etc.
Ces éléments peuvent être complétés par des entretiens, groupes de travail ou audits déjà réalisés. L’essentiel est de croiser plusieurs sources pour établir un état des lieux objectif.
L’analyse inclut également l’objectivation de la charge de travail. Qu’elle soit prescrite, réelle ou ressentie, physique ou mentale. Observation, entretiens, analyse des processus, questionnaires, diagnostics photo et simulations permettent de comprendre le travail réel et d’orienter les expérimentations.
Le management est central dans la QVT : observer les pratiques managériales et impliquer les managers de proximité renforce leur rôle de relais et contribue au succès des projets.
Déployer une démarche QVCT en ESSMS : formaliser le diagnostic et préparer les expérimentations
Formaliser le diagnostic permet de projeter les actions dans la durée, de structurer le débat et de préparer les expérimentations. Cela inclut l’ergonomie des postes, l’organisation des services, les pratiques managériales ou de nouvelles formes d’organisation. L’impact des expérimentations sur les conditions de travail doit être anticipé pour inscrire la démarche dans une logique de prévention.
Formation – Mettre en oeuvre une démarche QVCT en ESSMS
Développez les compétences nécessaires pour piloter et pérenniser une démarche QVCT en ESSMS, tout en impliquant vos équipes et en améliorant les conditions de travail.
🗣️Animé par Aziz El Qomri, consultant et formateur chez GePI Conseil.
Étape 3 : Expérimentation et évaluation embarquée
L’expérimentation teste de nouvelles idées directement dans le quotidien des équipes pour améliorer l’organisation et les conditions de travail. Le choix des expérimentations repose sur les projets identifiés lors du cadrage ou du diagnostic, les difficultés repérées et les initiatives locales (exemple : tester le télétravail).
Chaque expérimentation est pensée pour être évaluée en temps réel. Les retours des agents et managers permettent d’ajuster les actions régulièrement. La réussite des expérimentations nécessite une posture bienveillante, l’acceptation du droit à l’échec et la possibilité de réorienter les actions si nécessaire.
Zoom sur les indicateurs locaux et les espaces de d’expression
Pour mesurer l’impact, on définit des indicateurs simples et concrets, liés au travail réel, qui permettent de savoir rapidement ce qui fonctionne et ce qui doit être amélioré. Ces indicateurs peuvent, par exemple, suivre l’amélioration d’un processus, le ressenti des équipes ou la réussite d’une organisation expérimentée.
Parallèlement, des espaces d’expression offrent aux agents la possibilité de partager leurs expériences et de co-concevoir les solutions. Ces espaces complètent les indicateurs, donnent du sens aux données et enrichissent le dialogue, sans remplacer les réunions d’équipe ou le dialogue social.
Étape 4 : démarche QVCT en ESSMS : pérennisation et déploiement
Après les expérimentations, l’objectif n’est pas de revenir à des pratiques classiques ni de simplement reproduire ce qui a été testé. Il s’agit de pérenniser les actions efficaces, de généraliser les bonnes pratiques et d’ancrer de nouvelles façons de travailler, de dialoguer et d’évaluer. On peut résumer ce principe par l’expression : « La QVT appelle la QVT».
Pérenniser les actions et les projets
La QVCT ne consiste pas à « lisser » les difficultés. Elle vise à installer durablement de nouvelles modalités de conduite du changement, de dialogue et d’évaluation, en intégrant les usagers dès la conception. Les actions évaluées et réajustées sont ensuite déployées à l’ensemble de l’établissement, du site ou de l’organisation.
La pérennité se construit avant et après la démarche, avec des actions adaptées au contexte local :
- Avant la démarche : sensibilisation à la QVT, groupes de travail, instance de pilotage, animation des projets, questionnaires QVT, conception de grilles d’analyse, accord de méthode.
- Après la démarche : formation des encadrants et concepteurs, espaces d’expression sur le travail, observatoire QVT, guides de suivi et d’animation, baromètre QVT, suivi des bases de données sociales, revue régulière des projets.
Consolider les actions et les indicateurs de la démarche QVCT
Pour garantir l’impact réel et durable des actions, il est essentiel de mettre en place des dispositifs de suivi et d’évaluation. C’est ce qui permet de mesurer les progrès, d’ajuster les projets en temps réel et de garantir l’implication des équipes.
Pour cela :
- Les indicateurs QVCT, alimentés en continu par observations, enquêtes et retours des agents et usagers, permettent de mesurer l’impact réel et d’adapter les actions.
- La méthode d’évaluation embarquée, intégrée durablement, assure que le retour d’expérience des agents guide la conduite du changement.
- Les espaces d’expression offrent aux équipes un lieu pour partager réussites et difficultés et participer à l’amélioration continue.
Suivi dans la durée avec un baromètre QVT
Le suivi dans la durée peut être renforcé par un baromètre QVT ou un questionnaire périodique. Cela permet de vérifier si les projets améliorent vraiment les conditions de travail, la participation des équipes et la performance du service rendu aux usagers. Les résultats sont restitués de manière participative, dans le même esprit que l’ensemble de la démarche.
Le questionnaire peut couvrir différents aspects : travail quotidien, relations avec les usagers, pratiques managériales, parcours professionnels…
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Évaluations
Réalisez des évaluations et des audits
Enquêtes
Réalisez des enquêtes en ligne et analysez les résultats
Plan d’actions global
Suivez toute l’activité dans un plan d’actions consolidé
Événements Indésirables
Déclarez, traitez et analysez les événements indésirables
GED
Partagez des documents pour tous les établissements
Tableau de bord
Évaluez, analysez et suivez les indicateurs
Réclamations
Enregistrez, traitez et analysez les réclamations
Risques
Réalisez l’évaluation des risques professionnels et usagers
Suivre et nourrir le dialogue social
La QVCT doit devenir un processus régulier et concret. Les informations et indicateurs issus des actions nourrissent le dialogue social et professionnel, renforçant la participation des équipes et la pertinence des décisions.
Une démarche réussie se mesure, se partage et se pérennise, créant un cercle vertueux d’amélioration continue et de transformation durable.
Notre conclusion sur les différentes étapes de la démarche QVCT en ESSMS
La démarche QVCT en ESSMS n’est pas un projet ponctuel, mais un processus continu visant à améliorer durablement les conditions de travail, la qualité du service et l’implication des équipes. En combinant diagnostic partagé, expérimentations concrètes, suivi régulier et dialogue participatif, elle permet de généraliser les bonnes pratiques et d’ancrer de nouvelles façons de travailler. En résumé, mesurer, ajuster et pérenniser les actions crée un cercle vertueux où la QVT alimente elle-même son amélioration.
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